Manuel de gestion du patrimoine routier
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2.5.1 qu'est-ce que la résilience: similitudes et différences avec le risque

Le mot "résilience" provient du domaine de la mécanique des structures et fait référence à la capacité d'un matériau à résister à des actions dommageables en se remettant d'un état de flexion antérieur. Au cours des 50 dernières années, le dérivé de ce concept, en termes de "capacité à se remettre d'adversités ou de perturbations", a été étendu à un plus grand nombre de domaines, tels que la psychologie, l'écologie, la sociologie, l'urbanisme, etc. Dans le domaine du génie civil, depuis le début des années 2000, la résilience des réseaux de transport a été principalement définie en fonction de la réponse (impact et réactions) aux risques naturels ; toutefois, il convient de reconnaître qu'une approche basée sur la résilience devrait englober tous les types de risques (naturels et d'origine humaine). Plus récemment, l'ISO a introduit le concept de "résilience organisationnelle" (ISO 2017) comme "la capacité d'une organisation à absorber et à s'adapter dans un environnement changeant pour lui permettre d'atteindre ses objectifs", ce qui implique que la résilience dans la gestion du patrimoine routier peut également concerner des questions socio-organisationnelles autres que celles liées à l'exposition aux risques d'aléas.

Dans le contexte de la gestion du patrimoine routier, il convient de souligner les différences importantes entre le risque et la résilience (voir Fig. 1). Alors que le risque est une question à multiples facettes qui peut être associée à des menaces et des opportunités possibles, les risques eux-mêmes ne sont pas toujours négatifs et le risque est strictement lié à l'incertitude qui affecte tous les processus et toutes les interventions dans le cadre de la gestion du patrimoine d'infrastructures. D'autre part, la résilience, bien qu'elle soit basée sur une évaluation des risques, se concentre sur les questions liées à l'évitement ou à la minimisation des perturbations, au rétablissement des conditions initiales et au maintien de ces dernières ou à l'adaptation à un nouveau scénario d'exploitation. De manière simplifiée, une approche basée sur la résilience prend également en compte le temps, dans la mesure où il affectera la performance de rétablissement des infrastructures et du système de transport dans son ensemble.

Figure 1. Résilience vs Gestion du patrimoine routier

Sur la base de ces principes, le cadre d'évaluation des risques est parfaitement intégré dans l'approche globale de la gestion du patrimoine de l'agence. Il constitue également un bon point de départ pour élaborer des stratégies et des actions basées sur la résilience et les intégrer dans le processus décisionnel global.

Après l'identification des risques possibles pour la fonctionnalité des infrastructures, un processus d'évaluation des risques nécessite la définition de la probabilité et des conséquences d'un événement ou d'un scénario. De cette manière, le choix du traitement du risque, c'est-à-dire une intervention visant à atténuer la probabilité et les conséquences d'un risque spécifique, présente les mêmes caractéristiques communes que l'approche fondée sur la résilience. Dans le cadre d'une approche conventionnelle fondée sur les risques, les probabilités et les conséquences de différents scénarios incluant ou non des interventions de maintenance sont évaluées qualitativement ou quantitativement afin de fournir des informations pour l'établissement des priorités et l'allocation du budget. Cependant, dans une approche fondée sur la résilience, ces scénarios sont améliorés par le temps nécessaire pour se rétablir à la suite d'événements défavorables qui peuvent remettre en question la capacité de l'infrastructure à remplir efficacement sa fonction souhaitée et à mettre en œuvre des stratégies d'adaptation.

Par exemple, considérons la nécessité d'améliorer la capacité d'un réseau routier à résister à un événement sismique (c'est-à-dire la vulnérabilité sismique) par rapport à son parc de ponts (à condition qu'il soit possible d'évaluer sur une base stochastique le scénario de dommages induits par une excitation sismique). En utilisant une approche basée sur le risque, un gestionnaire routier pourrait évaluer la priorité des interventions de mise à niveau sismique dans le cadre d'une allocation budgétaire restreinte. Cependant, il est clair qu'il serait impossible de renforcer l'ensemble du parc de ponts et que, par conséquent, à la suite d'un tremblement de terre grave, certains ponts seraient probablement endommagés, ce qui entraînerait une perturbation du réseau qui prendrait un certain temps à se rétablir. D'autre part, selon une approche basée sur la résilience, plusieurs stratégies d'intervention supplémentaires peuvent être entreprises, détaillées comme suit:

1) Les ponts à moderniser peuvent être soigneusement sélectionnés afin de réduire l'impact de la perturbation globale du trafic induite par un tremblement de terre et, selon ce schéma de priorisation, les ponts restants qui n'ont pas été modernisés en raison de contraintes budgétaires et qui subiront des dommages importants peuvent être restaurés selon le même schéma de priorisation mentionné ci-dessus après l’événement qui les a endommagés.

2) Les interventions de mise à niveau peuvent être conçues de manière adéquate afin d'accélérer les actions de réparation et donc le temps de rétablissement.

Les deux stratégies peuvent contribuer à accroître la résilience du réseau routier dans la mesure où la fonctionnalité du réseau routier se dégradera moins, en ce qui concerne le niveau de performance, en raison de la première stratégie (voir la section "A" de la figure 2). Cependant, à cet égard, il faut reconnaître qu'une action de modernisation préventive correspond à l’approche d'une méthodologie basée sur le risque alors qu'une priorisation dans la phase de restauration relèvera d'un processus basé sur la résilience.

En outre, le réseau sera remis en état de fonctionnement dans un délai plus court, conformément à la deuxième stratégie (voir les sections "B" et "C" de la figure 2).

En ce qui concerne l'exemple précédent, il apparaît clairement que la conception et la mise en œuvre de stratégies basées sur la résilience nécessitent un niveau d'information plus élevé sur les réseaux routiers gérés en ce qui concerne les caractéristiques sismiques locales, l'état structurel actuel des ponts et la demande de transport. 

Références

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